Publié le :
19/06/2025 15:40:59
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Il y a des noms qui marquent une vie. Pour moi, Penfolds fait partie de ceux-là.
En 2002, comme beaucoup d’œnophiles belges ou français, j’étais solidement ancré dans les terroirs du Rhône (je suis un amoureux fou de Syrah), de Bourgogne, de Bordeaux, de Champagne et d’Alsace. Puis un jour, je suis tombé sur une bouteille de Shiraz d’Australie. Un vin signé Penfolds.
Ce moment a tout changé. J’ai compris que le monde du vin était plus vaste que les frontières européennes. Que d’autres terroirs, d’autres histoires, d’autres émotions attendaient d’être explorés. C’est ce jour-là, sans le savoir, que Wines of Earth est né.
En l’an 2002, j’étais comme beaucoup d’amateurs belges : amoureux des grands vins de France. Mes références étaient classiques. Mes repères, bien ancrés. Un bon vin, c’était un Pommard bien né, un Châteauneuf solaire, un Sancerre vif ou un vieux Pauillac tannique. Ce que je cherchais dans un vin, c’était une forme d’élégance traditionnelle. Je n’avais encore jamais bu un vin australien.
Et puis, ce fameux jour.
Fin d’une journée d’automne. Je quitte le bureau, direction le supermarché. La fatigue est présente, le moral un peu bas. Je cherche de quoi dîner et, surtout, un rouge réconfortant. Au rayon « Vins », je passe en revue les régions connues et reconnues : Bordeaux, Bourgogne, Rhône… Puis, tout au bout, une étagère minuscule : « Vins du monde ».
Là, je distingue une étiquette blanche, épurée, sobre. Et un nom en rouge : Penfolds. Dessous, une mention mystérieuse : “Bin” suivie d’un numéro. Puis la mention Shiraz. Ça ressemble à Syrah, non ? Pas sûr. Intrigué, je glisse la bouteille dans mon panier, par curiosité.
Chez moi, plat prêt, je dévisse la capsule (un soupçon de doute : est-ce que ce sera aussi bon qu’avec un bouchon de liège ?), verse un verre, approche le nez… Et là, c’est le choc immédiat !
C’est un vin dense, noir, éclatant, mais jamais lourd. L’équilibre est chirurgical. Les arômes explosent : fruits noirs compotés, menthol, moka, poivre, réglisse, bois noble. En bouche, c’est la révélation : la texture veloutée d’un Bourgogne, l’ampleur d’un Châteauneuf, mais avec une fraîcheur et une tension que je ne connaissais pas.
Ce vin parlait une autre langue. Une langue solaire, directe, expressive. Et pourtant, il y avait cette finesse. Ce sens du détail dans l’assemblage, cette maîtrise du temps, cette précision dans le fruit.
J’ai compris que mes repères étaient européens, mais que mes émotions, elles, étaient universelles. Ce vin m’a enseigné l’humilité. M’a invité à la curiosité. Il a ouvert la porte à d’autres régions, d’autres continents, d’autres vignerons.
C’est dans cette émotion que l’idée de Wines of Earth a germé.
Pas un business plan. Pas une stratégie marketing. Un besoin presque vital de retrouver ce moment-là, de le transmettre, de le partager avec d’autres amateurs comme moi : curieux, passionnés, exigeants, mais ouverts. Wines of Earth, ce n’est pas juste une boutique en ligne. C’est une invitation à goûter le monde, à découvrir que le grand vin ne connaît pas de frontières.
Et tout a commencé avec une Shiraz de Penfolds. Laissez-moi vous parler de ce domaine, ô combien important pour la suite.
L’histoire de Penfolds, c’est celle d’un domaine qui a su faire rayonner le vin australien dans le monde entier. Mais c’est d’abord, et surtout, une aventure humaine et familiale, portée par une femme exceptionnelle : Mary Penfold.
Tout commence en 1843, lorsque le Dr Christopher Rawson Penfold (33 ans) et son épouse Mary (24 ans) quittent l’Angleterre pour s’installer à Magill, près d’Adelaïde en Australie méridionale (South Australia). Ils acquièrent un domaine de 500 acres (environ 200 hectares) au pied de la Mount Lofty Ranges, sur lequel ils plantent principalement du grenache. Leur objectif n’est pas encore de produire de grands vins de garde. Christopher est médecin, et il croit aux propriétés thérapeutiques du vin. Il veut produire des toniques fortifiés pour ses patients, dans le style du porto et du xérès.
Mais très rapidement, la demande explose, pour les fortifiés comme pour le clairet ou le Riesling que le domaine se met à produire. Mary se retrouve à gérer la cave, conduire les assemblages, surveiller les fermentations, pendant que son mari soigne ses patients. Elle apprend vite, et bien.
À la mort de Christopher en 1870, Mary prend seule les rênes de l’exploitation. Elle refuse de céder l’entreprise, malgré les pressions de son gendre Thomas Francis Hyland, et continue à expérimenter, cultiver et développer l’activité.
À cette époque, la cave produit déjà plus de 340 000 litres de vin, et propose une gamme diversifiée : grenache, verdelho, mourvèdre, frontignac, pedro ximénez, en rouge comme en blanc, doux comme sec. La demande augmente avec le développement des colonies voisines de Victoria et de Nouvelle-Galles du Sud plus à l’est.
Mary est partout : à la vigne, à la cave, aux assemblages. Elle ne suit aucune règle figée — elle travaille à l’instinct, au goût, à la dégustation. Un article de 1874 précise que Mary attend parfois 2 à 3 ans avant de procéder aux assemblages, le temps de laisser le vin se faire, ce qui est rare à l’époque.
Elle engage un maître de chai, Joseph Gillard, s’attaque aux maladies de la vigne comme le phylloxera, et finit par faire de Penfolds l’un des plus grands producteurs de vin du pays. Lorsqu’elle prend sa retraite en 1884 à l’âge de 68 ans, Penfolds possède un tiers des stocks de vin de toute l’Australie-Méridionale.
Mary décède en 1896, mais son empreinte est gravée dans les fondations du domaine. La suite est assurée par sa fille Georgina et son gendre Thomas Francis Hyland, puis transmis à leurs 2 filles et 2 fils. En 1903, Penfolds devient même le plus grand domaine de la région d’Adélaïde, avec une production totale de 450 000 litres.
En 1904 et en 1912, la famille acquiert de nouvelles terres en McLaren Vale et en Nouvelle-Galles du Sud. Puis le grand vignoble de Kalimna en Barossa Valley en 1945.
Au 20e siècle, la relève est assurée par Gladys Penfold Hyland, qui prend la tête du conseil d’administration en 1948, après la mort de son mari, et ce, jusqu’en 1962. C’est elle qui soutient un jeune employé nommé Max Schubert, au moment où il entame ses expériences avec un vin nouveau, totalement hors normes : le Grange Hermitage (plus tard appelé Grange).
Inspiré par un voyage à Bordeaux en 1951, Max Schubert imagine un vin qui allierait la concentration et la longévité d’un grand cru bordelais, mais avec la générosité du fruit australien. Le premier Grange est produit en secret. Il est d’abord rejeté, mais le temps lui donnera raison. Grange devient le vin le plus iconique d’Australie, reconnu au niveau international, jusqu’à être qualifié par le célèbre critique Robert Parker en 1995 de « l’un des meilleurs candidats au titre de meilleur vin de la planète ».
Dans les années 1960, Max Schubert diversifie la gamme en lançant les cuvées Bin 389, Bin 707, Bin 28 et Bin 128. Chaque "Bin" désigne à l’origine une zone de stockage dans les caves de Magill Estate. Chacune deviendra un classique.
Après Schubert et le rachat du domaine par Tooth and Co. en 1976, d’autres œnologues poursuivent l’aventure :
Penfolds aurait pu rester un domaine emblématique mais local. Une belle maison familiale du Sud australien, fière de ses traditions. Mais le destin en a décidé autrement.
En 1976, une page se tourne : Penfolds est rachetée par Tooth and Co., un brasseur basé en Nouvelle-Galles du Sud. Ce n’est plus une famille qui pilote, mais une entreprise. Ce changement marque le début de l’internationalisation de Penfolds. L’année suivante, la marque devient le sponsor principal du club de rugby St George Dragons à Sydney. Un partenariat qui durera presque vingt ans, jusqu’en 1995. Les Dragons, soutenus par Penfolds, remporteront deux titres et atteindront plusieurs finales, devenant l’un des clubs les plus en vue d’Australie. La maison de vin devient ainsi une marque populaire, ancrée dans la culture du pays.
En parallèle, en 1982, Penfolds passe entre les mains du groupe Adelaide Steamship Company, puis en 1990, le domaine est racheté par SA Brewing, qui restructure ses activités : les vins sont confiés à une nouvelle entité nommée Southcorp Wines.
L’expansion continue. En 2005, Southcorp Wines est absorbée par le Foster’s Group. Et enfin, en 2011, la division vin de Foster’s devient indépendante. Elle prend le nom de Treasury Wine Estates (TWE), une entreprise autonome cotée en bourse à Melbourne. Penfolds devient ainsi une marque phare du groupe TWE, un acteur mondial du vin.
Heureusement, cette évolution ne s’est pas faite au détriment de l’identité du domaine. Penfolds reste fidèle à ses racines. Deux caves emblématiques assurent aujourd’hui la production : le Magill Estate, berceau historique aux portes d’Adelaide, et le site de Nuriootpa dans la Barossa Valley.
La créativité, elle, n’a jamais été aussi vive. En 2012, Penfolds frappe les esprits en lançant une cuvée collector : le Block 42 millésime 2004, vendu dans des ampoules de verre soufflées à la main par l’artiste Nick Mount. Prix unitaire ? 168 000 dollars US. Un vin devenu légendaire, classé par le Huffington Post comme le plus cher jamais vendu directement par une cave.
Chez Penfolds, tout commence dans la terre. Mais pas UNE terre. Ce qui rend la maison unique, c’est sa capacité à assembler les meilleurs raisins de plusieurs régions, parfois très éloignées, dans une philosophie multi-régionale audacieuse, aujourd’hui devenue sa signature.
Dès le 19e siècle, Penfolds comprend que pour créer des vins constants et complexes, il faut savoir sélectionner le bon cépage au bon endroit, au bon moment. Aujourd’hui, ce sont plus de 200 vignobles qui alimentent ses cuvées, principalement en Australie, mais aussi ailleurs dans le monde.
Voici déjà la cartographie des vignobles australiens de Penfolds :
Région | Superficie | Cépages | Particularités / Cuvées associées |
---|---|---|---|
Magill Estate (Adelaide) | 5,34 ha | Shiraz | Vignoble historique de 1844. Magill Estate Shiraz, contribue au Grange. |
Kalimna (Barossa) | 290 ha, dont 153 ha plantés | Shiraz, Cabernet Sauvignon, Mataro, Sangiovese | Vignes centenaires (Block 42). Cuvées : Grange,Bin 28, Bin 707. |
Koonunga Hill(Barossa) | 93 ha | Shiraz, Cabernet Sauvignon | Cuvées Koonunga Hill, Bin 389. |
Waltons (Barossa) | 317 ha, 130 ha plantés | Shiraz, Cabernet Sauvignon, Mataro | Assemblage de cépages rouges pour les cuvées Bin Series. |
Stonewell (Barossa) | 33 ha | Shiraz, Cabernet Sauvignon | Composant clé dans les assemblages rouges haut de gamme. |
Woodbury (Eden Valley) | 69,56 ha | Riesling | Région haute altitude → Bin 51 Riesling. |
McLaren Vale (4 sites) | 141 ha | Shiraz, Grenache, Cabernet Sauvignon | Climat méditerranéen. Cuvées : St Henri Shiraz,Bin 389, Bin 407. |
Coonawarra | Environ 50 ha | Cabernet Sauvignon, Shiraz | Sols terra rossa. Bin 128, Grange, autres Bin Series. |
Henty (Victoria) | Pinot Noir, Chardonnay, Gewürztraminer | Bin 23 Pinot Noir, Bin 311 Chardonnay, Bin 144 Yattarna Chardonnay. | |
Tumbarumba*(Nouvelle-Galles du Sud)* | Chardonnay | Altitude élevée au pied des Snowy Mountains. Certains millésimes de Bin 144 Yattarna Chardonnay. | |
Tasmanie | Chardonnay, Pinot Noir, Gewürztraminer | Île au climat frais. Bin 311, Yattarna, Cellar Reserve. |
Penfolds n’est pas seulement une grande maison australienne. C’est aussi une ambassadrice du vin sans frontières. Fidèle à sa philosophie d’assemblage multi-régions, la maison s’est aventurée au-delà de l’Australie pour explorer de nouveaux terroirs, de nouveaux cépages et de nouvelles manières d’exprimer son style.
Depuis plus de vingt ans, Penfolds plante, élève et vinifie des vins en Californie, en France, et désormais en Chine. Voici un aperçu des vignobles internationaux qui font battre le cœur de Penfolds dans l’hémisphère nord et au-delà du Pacifique :
Région | Localisation | Cépages / Particularités | Vins concernés |
---|---|---|---|
Paso Robles (Camatta Hills Vineyard - 1997) | Californie, USA | Vignes issues des clones australiens (Magill et Kalimna) | Bin 600 Cabernet Shiraz. |
Napa Valley (1998) | Californie, USA | Cabernet Sauvignon concentré, climat chaud tempéré | Quantum Bin 98, Bin 149, Bin 704. |
Sonoma (1998) | Californie, USA | Cabernet expressif et structuré | Source complémentaire pour Bin 600. |
Bordeaux (2019) | France | Partenariat avec Dourthe. Cabernet, Merlot, Petit Verdot | Penfolds II, FWT 585. |
Champagne (2019) | France | Partenariat avec Thiénot. Grand Cru blanc de blancs / noirs / rosé | Série Champagne de Penfolds. |
Shangri-La / Ningxia(2022) | Chine | Cabernet Sauvignon (Yunnan), Marselan (Ningxia) | Cuvée CWT – Chinese Winemaking Trial. |
Quand on regarde la collection de Penfolds, on peut vite se sentir perdu : des numéros (Bin 28, Bin 707, Bin 389…), des lettres (RWT, FWT, CWT), des noms de projets, des cuvées australiennes ou internationales… Et pourtant, tout est logique. Penfolds a structuré sa gamme en grandes familles. En voici une présentation claire, pour mieux comprendre ce que chaque cuvée raconte dans le verre.
Ce sont les piliers historiques de la maison. Le mot "Bin" vient des anciens compartiments de stockage dans les caves de Magill Estate. « Bin » signifie Batch Identification Number. On retrouve par exemple :
Parmi les Bin, il y a eu THE Bin : le Grange (Bin 95). Un vin mythique. Son nom vient du Grange Cottage, le nom de la cave à Magill. Il était auparavant nommé Bin 1.
Grange, c’est le vin qui a changé la face du vin australien. Avec ce vin, Max Schubert voulait montrer qu’une shiraz australienne pouvait vieillir comme un grand cru français, tout en gardant une personnalité propre, solaire, audacieuse.
Au départ, Grange est rejeté par la direction. Trop différent, trop puissant, trop loin des standards. Max Schubert continue en secret pendant des années. Puis vient la reconnaissance. Nationale, puis internationale. Aujourd’hui, Grange est inscrit au patrimoine culturel de l’Australie-Méridionale. Un symbole.
Il est tout simplement unique :
En bouche, c’est un vin majestueux. Large, profond, avec des couches de fruits noirs, d’épices, de cuir, de chocolat amer, de fumée. Mais toujours tenu par une acidité parfaite et une trame tannique noble.
Chez Penfolds, on aime l’innovation. Certaines cuvées sont nées comme des essais, puis sont devenues des références :
Même hors des frontières de l’Australie, avec d’autres terroirs, Penfolds maintient la même philosophie :
Et je vous propose un dernier tableau pour mieux comprendre la numérotation des grandes cuvées de Penfolds :
Nom complet | Année de création | Origine / Cépages | Particularité / Histoire |
---|---|---|---|
Bin 95 Grange | 1951 | Multi-régions, Shiraz (parfois + Cabernet) | Créé par Max Schubert après son voyage à Bordeaux. Ex-Bin 1. |
Bin 707 | 1964 | Multi-régions, 100 % Cabernet Sauvignon | Nommé d’après le Boeing 707. Style puissant. |
Bin 28 | 1959 | Multi-régions (initialement Kalimna - Barossa) | Premier Bin officiel. Vinifié alors que Grange était encore “secret”. |
Bin 389 | 1960 | Multi-régions, Cabernet + Shiraz | “Baby Grange” – utilise les mêmes barriques. Un des vins les plus collectionnés d’Australie. |
Bin 144 Yattarna | 1995 | Multi-régions (Henty, Tasmanie, Tumbarumba…) | “White Grange”. Issu de 144 essais. |
RWT Bin 798 | 1997 | Barossa Valley, Shiraz | “Red Winemaking Trial”. |
Bin 51 | 1999 | Eden Valley, Riesling | Sec, floral, précis. |
Bin 8 | 2003 | Shiraz / Cabernet, multi-régions | Bin 8 = barriques ex-28/128/389. |
Bin 311 | 2005 | Vignobles frais (Tasmanie, Henty…) | |
Bin 23 | 2009 | Multi-régions, Pinot Noir | Maturation en “Cellar 23” à Magill. |
Bin 98 Quantum | 2018 | Napa Valley + Australie, Cabernet | |
Bin 149 | 2018 | Napa Valley + South Australia | Le “149” fait référence au pourcentage de cabernet australien dans le blend. |
Bin 704 | 2018 | Napa Valley, Cabernet Sauvignon | 704 = miroir du Bin 407 australien. |
Bin 600 | 2018 | Napa / Sonoma / Paso Robles | Nommé d’après le Creston 600 Ranch. Style australien sur sol californien. |
Penfolds II | 2019 | Bordeaux + Barossa, Cabernet/Shiraz | Co-création avec la Maison Dourthe. Élégance française, puissance australienne. |
FWT (French Winemaking Trial) Bin 585 | 2019 | Bordeaux (Haut-Médoc), Cabernet / Merlot / Petit Verdot | Le Bin 585 évoque les dépenses de Schubert lors de son 1er voyage à Bordeaux en 1951. |
CWT (China Winemaking Trial) | 2022 | Ningxia + Shangri-La, Cabernet / Marselan | Cuvée expérimentale avec terroirs chinois. |
Penfolds, ce n’est pas simplement une maison historique ou un emblème du vin australien. C’est une philosophie du vin. Alors la vraie question, c’est : à qui ces vins s’adressent-ils ?
Aux curieux et curieuses. Ceux qui aiment sortir des sentiers battus, qui veulent goûter ce que le monde a de meilleur à offrir, au-delà du Rhône ou du Bordelais. Penfolds, c’est l’école de l’ouverture.
Aux collectionneur·es. Parce qu’un Bin 707 ou un Bin 389 vieillit admirablement bien. Parce que certaines cuvées deviennent cultes. Parce que l’ampoule de Block 42 fait frissonner le monde des enchères.
Aux amoureux et amoureuses du goût. Ceux qui recherchent des vins pleins, expressifs, structurés, mais jamais lourds. Des vins qui ne copient pas le Vieux Monde, mais qui parlent une autre langue – celle de la maturité, de la clarté, de la franchise.
Et même, pourquoi pas, à ceux qui découvrent le vin. Parce que Penfolds a cette accessibilité dans ses cuvées d’entrée de gamme (Koonunga Hill, Bin 8), sans jamais trahir son style. Penfolds n’est pas élitiste.
Il est difficile d’aimer profondément un domaine sans s’inquiéter pour son avenir.
Aujourd’hui, Penfolds est à la croisée des chemins. Après avoir bâti sa légende sur la qualité, la constance, l’élégance, elle semble depuis quelques années adopter une nouvelle stratégie marketing qui déroute de nombreux amateurs de longue date.
On ne peut nier que Penfolds cherche à séduire une génération plus jeune, plus digitale, plus mondiale. Les collaborations avec des influenceurs, des créateurs de mode (comme NIGO), les éditions limitées au packaging clinquant ou le repositionnement de Grange comme objet de luxe « lifestyle » sont des signes clairs. Ils visent à repositionner la marque dans l’imaginaire des nouvelles élites culturelles. Est-ce efficace ? Peut-être. Est-ce fidèle à ce que Penfolds représentait ? Je ne sais pas.
Penfolds a été pendant longtemps le symbole d’une réussite tranquille, d’une excellence qu’on attendait, millésime après millésime. Mais ce serait absurde de se cacher les yeux pour ne pas voir que le monde évolue, comme le climat ou encore les générations. Le changement est inévitable. Point.
Aujourd’hui, on sent que la maison australienne est à la recherche de son nouveau visage, entre stratégie globale et marketing de masse, entre fidélité à sa clientèle historique et quête de nouvelles tribus numériques, qui seront aussi la clientèle de demain.
Je comprends qu’il faut parler aux générations futures. Je comprends aussi que le marché chinois, longtemps moteur de croissance, s’est partiellement fermé, obligeant les grandes marques à pivoter. Mais ce pivot peut-il se faire sans trahir l’héritage ? Sans brouiller les repères de celles et ceux qui ont soutenu la marque pendant 10, 20, parfois 40 ans ?
La qualité des vins, elle, reste intacte. Je le constate à chaque dégustation. Penfolds vend encore chaque bouteille de Grange qu’elle produit. Mais en 2040, à qui les vendra-t-elle ? Sera-t-elle restée fidèle à son identité ? Ou aura-t-elle troqué son âme contre des likes ?
Seul l’avenir le dira.
Moi, je continue à ouvrir les flacons de Penfolds avec émotion. Et je suis aussi fier de pouvoir vous en proposer dans ma cave en ligne Wines of Earth. Voici la liste actuelle :
Et vous, avez-vous déjà pu goûter un Penfolds ? Quelle en a été votre impression ? Dites-moi tout en commentaire ou sur Facebook.